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Un jardin mystérieux

Photo du rédacteur: Florence ClémenteFlorence Clémente

Le végétal exubérant avait repoussé les villages contre les collines aux pentes adoucies. Il s’infiltrait dans les rues, se propageait par-dessus les murs qui séparaient les propriétés. Cernées les maisons de maitres et les belles demeures ; étranglés leurs vergers et leurs parcs, tous dévorés par cette plante foisonnante. Au détour d’une ruelle sinueuse, les lianes surgissaient éclatantes de verdure et copiant le lierre, s’insinuaient en s’agrippant à toutes les aspérités d’une enceinte, d’un portail ou d’un porche. La végétation s’infiltrait dans les jardins, rampait jusqu’aux maisons, gravissait les collines, avalait les forêts parfois jusqu’aux sommets puis redescendait jusqu’à la nationale. Seul le trottoir ou l’accotement retenait cette terre miraculeuse qui tentait de s’échapper au moindre orage.


A la sortie des villages, de chaque côté de la route, le long des côteaux, de petits murs en pierre sèches essayaient de contenir et délimiter la folle croissance de la lambrusque. Des lichens rouge griotte avaient colonisé le dessus des murets où venaient se réchauffer des lézards. C’était le paradis d’une multitude d’insectes, d’araignées et de papillons. Un théâtre de verdure où les oiseaux s’égosillaient sur les talus parsemés de coquelicots. Un royaume où l’escargot était roi. Par endroit les murets se faisaient murs, particulièrement soignés et coiffés d’un petit toit à une seule pente. Dans cette contrée les hommes, par leur travail minutieux avaient façonné ces jardins que l’on nomme ici des clos parfois fermés d’un portail ou d’une grille en fer forgé d’un faste imprévu.


De cet Eden mystérieux jaillissait une promesse renouvelée chaque année par un travail asservissant et fastidieux de jardinier. Tailler, tirer et brûler, piocher, plier et attacher, ébourgeonner, désherber, relever et baisser les fils, mettre et enlever les agrafes, écimer, effeuiller, éclaircir. Prier. Récolter.

Quand le ciel, la terre et le travail des hommes avaient transformé ce sol pauvre froid et rocailleux en un eldorado enchanteur, on pouvait alors grimper tout en haut des collines où la canopée découpée en une mosaïque de Climats prestigieux dominait audacieusement la Côte. La vue y était à couper le souffle. Le regard descendait jusqu’à la plaine et quand le ciel était très dégagé, il pouvait accrocher le sommet enneigé des Alpes.




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